Fibrillation atriale et insuffisance rénale
La fibrillation atriale (FA) et la maladie rénale chronique sont deux pathologies dont l’incidence augmente avec l’âge et qui partagent des facteurs de risque communs comme l’hypertension artérielle, l’insuffisance cardiaque, le diabète et l’obésité.(1,2) Ainsi, ces deux pathologies coexistent chez un nombre important de patients : jusqu’à 20% des patients atteints de maladie rénale chronique souffrent de FA et 40% à 50% de patients atteints de FA ont une maladie rénale chronique.(1)
Quelles sont les conséquences de l’insuffisance rénale chez le patient atteint de FA ?

Qu’elle soit aigue ou chronique, l’insuffisance rénale est responsable de troubles de l’hémostase et augmente à la fois les complications hémorragiques et pro-thrombotiques.(3,4)
Dans le registre GARFIELD, il a été montré auprès d’environ 33 000 patients nouvellement diagnostiqués d’une FA, que la maladie rénale chronique modérée à sévère était un facteur de risque indépendant de l’accident vasculaire cérébral (AVC) ou d’une embolie systémique, d’une hémorragie majeure, de l’insuffisance cardiaque, du syndrome coronarien aigu mais aussi un facteur de risque de mortalité toute cause ou d’origine cardiovasculaire, dans la première année suivant le diagnostic de FA.(5) Ainsi, dans la sous-population des patients atteints de FA et de maladie rénale chronique modérée à sévère, le risque d’AVC augmentait de plus de 50% et le risque de saignement majeur d’environ 90% comparativement aux patients atteints de FA sans maladie rénale chronique.(5)
Chez le patient atteint de FA, il est donc primordial de surveiller régulièrement les facteurs de risque hémorragique tels que l’insuffisance rénale et d’évaluer son impact sur le traitement mis en place.(1)
En pratique, quel est le suivi de la fonction rénale d’un patient sous traitement anticoagulant atteint d’insuffisance rénale ?

Chez les patients à qui l’on prescrit un anticoagulant oral direct (AOD), la fonction rénale doit être évaluée par le biais du calcul de la clairance de la créatinine à l’aide de la formule de Cockcroft-Gault, que ce soit pour la mise en place du traitement ou tout au long de son suivi.(6)
Ces médicaments sont, en effet, éliminés en partie par les reins et toute modification de la fonction rénale peut donc affecter leur concentration plasmatique et in fine le risque hémorragique du patient.(7) Ayant été utilisée lors du développement clinique des AOD, la méthode de Cockcroft-Gault reste la méthode de référence pour évaluer la fonction rénale des patients traités par AOD.(6,8)
La fréquence du suivi de la fonction rénale des patients sous AOD est définie en fonction du seuil de l’atteinte rénale ou d’autres paramètres tels que l’âge et le poids, voir Tableau 1.(7) Une adaptation des posologies peut s’avérer nécessaire en cas de modification de la fonction rénale.(6)
Tableau 1 : Modalités du suivi de la fonction rénale pour les patients sous AOD(7,9)

A ce jour, en Europe, les AOD sont contre-indiqués en cas d’insuffisance rénale chronique terminale (clairance de la créatinine < 15 ml/min) ou chez les patients sous dialyse, les données sur les bénéfices des AOD dans cette population spécifique étant encore limitées.(1,4,8) Le dabigatran est également contre-indiqué chez les patients atteints d’insuffisance rénale sévère (clairance de la créatinine entre 15 et 29 ml/min).(8)
Pour les patients atteints d’insuffisance rénale sous traitement par antivitamine K, le suivi de l’international normalized ratio (INR) s’effectue de façon plus rapprochée que chez les patients présentant une fonction rénale normale, soit plus d’une fois par mois, et la dose initiale est généralement diminuée.(8)
Références :
1. Hindricks G et al. 2020 ESC Guidelines for the diagnosis and management of atrial fibrillation developed in collaboration with the European Association of Cardio-Thoracic Surgery (EACTS). Eur Heart J 2021;42(5):373-498.
2. HAS. Guide du parcours de soins – Maladie rénale chronique de l’adulte (MRC). Juillet 2021. Disponible sur le site de la HAS : https://www.has-sante.fr (site consulté le 05/06/2023).
3. Brunet P et al. Troubles de l’hémostase au cours de l’insuffisance rénale chronique. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Néphrologie, 18-062-C-11, 2007.
4. Rogula S et al. Safety and Efficacy of DOACs in Patients with Advanced and End-Stage Renal Disease. Int J Environ Res Public Health. 2022 Jan 27;19(3):1436.
5. Goto S et al. GARFIELD‐AF Investigators. Management and 1-Year Outcomes of Patients With Newly Diagnosed Atrial Fibrillation and Chronic Kidney Disease: Results From the Prospective GARFIELD - AF Registry. J Am Heart Assoc. 2019 Feb 5;8(3):e010510.
6. HAS. Guide parcours de soins – Fibrillation Atriale. Février 2014. Disponible sur le site de la HAS : https://www.has-sante.fr (site consulté le 05/06/2023).
7. HAS. Bon usage du médicament. Fibrillation Auriculaire non valvulaire : Quelle place pour les anticoagulants oraux ? Mai 2018. Disponible sur le site de la HAS : https://www.has-sante.fr (site consulté le 10/06/2023).
8. ANSM. Les anticoagulants en France en 2014 : état des lieux, synthèse et surveillance. Avril 2014. Disponible sur le site de l’ANSM : https://ansm.sante.fr (site consulté le 10/06/2023).
9. Steffel J et al. 2021 European Heart Rhythm Association Practical Guide on the Use of Non-Vitamin K Antagonist Oral Anticoagulants in Patients with Atrial Fibrillation. Europace. 2021 Oct 9;23(10):1612-1676.
Réf PP-UNP-FRA-1789 - CV-FR-2300179-NP - Septembre 2023