Conseils face à un saignement sous anticoagulant oral direct
Quelle est la conduite à tenir en cas de saignement sous anticoagulant oral direct (AOD) ?
Afin d’assurer une prise en charge optimisée du saignement sous AOD, il est suggéré de mettre en place un protocole interne à l’hôpital reposant sur une collaboration interdisciplinaire entre les cardiologues/médecins vasculaires, les experts d’hémostase, les urgentistes/spécialistes des soins intensifs, les chirurgiens et autres professionnels de santé concernés. Ce protocole de prise en charge de l’hémorragie sous AOD devrait notamment préciser la disponibilité et les indications des tests spécifiques de coagulation ainsi que la disponibilité et l’utilisation des agents de réversion de l’anticoagulation.(1)
La conduite à tenir en cas d’une hémorragie survenant chez un patient sous traitement par AOD est détaillée sur la figure 1.
Tableau 1 : Eléments à vérifier lors du suivi d’un patient sous AOD.(1-3)

AOD : anticoagulant oral direct.
*Les tests spécifiques permettant de doser les AOD sont l’activité anti-Xa, le temps de prothrombine dilué ou le temps d’écarine.(3)
** > 30 ng/ml dans le cas d’une hémorragie intracrânienne.(2)
L’évaluation du type d’hémorragie (grave ou non grave) guide la prise en charge et se base sur des critères précis (hémorragie contrôlable ou non par les moyens usuels, stabilité ou instabilité hémodynamique du patient, nécessité ou non d’un geste hémostatique urgent, nécessité ou non de transfusion de concentrés de globules rouges, localisation).(2)
Les facteurs impactant la concentration plasmatique de l’AOD doivent être recherchés(1) :
- Heure de la dernière prise
- Dosage de la dernière prise
- Nombre de prises par jour
- Fonction rénale (par la mesure de la clairance de la créatinine en utilisant la formule de Cockcroft)
- Fonction hépatique
- Médicaments concomitants
La prise en charge des hémorragies non graves repose sur un traitement hémostatique tel qu’une compression mécanique ou une intervention chirurgicale mineure pour obtenir l’hémostase.(2,4) En effet, en raison de la courte demi-vie des AOD, l’hémostase du patient est supposée se normaliser en 12 à 24 heures, sous réserve d’une fonction rénale normale.(5) Tout saignement occulte avéré ou suspecté nécessitera une investigation visant à découvrir la source du saignement pour permettre son traitement.(1) Il est probablement recommandé de réévaluer les modalités du traitement par AOD, notamment la posologie, l’adaptation à la fonction rénale et les traitements concomitants du patient qui pourraient avoir contribué au saignement (grade 2+).(2)
La prise en charge des hémorragies graves inclut l’arrêt de l’AOD, une prise en charge symptomatique, hémostatique et étiologique de l’hémorragie et l’administration d’un agent de réversion. Mesurer la concentration plasmatique en AOD en urgence est probablement recommandé, pour estimer le niveau d’anticoagulation (grade 2+).(2)
En cas d’hémorragie intracrânienne ou de choc hémorragique, le patient devra recevoir sans attendre les résultats des tests biologiques, sauf si disponibles en quelques minutes, un agent de réversion de l’anticoagulation (grade 1+).(2)

Références :
- Steffel J et al. 2021 European Heart Rhythm Association Practical Guide on the Use of Non-Vitamin K Antagonist Oral Anticoagulants in Patients with Atrial Fibrillation. Europace. 2021;23(10):1612-1676.
- Douillet D et al. Recommandations sur la gestion de l’anticoagulation dans un contexte d’urgence - Guidelines on the Management of Anticoagulant in Emergency Setting. 2024
- Godon A et al. Gestion des anticoagulants oraux en urgence. Congrès de la SFAR, 2019.
- Hindricks G et al. 2020 ESC Guidelines for the diagnosis and management of atrial fibrillation developed in collaboration with the European Association of Cardio-Thoracic Surgery (EACTS). Eur Heart J 2021;42(5):373-498.
- HAS. Fibrillation auriculaire non valvulaire. Quelle place pour les anticoagulants oraux ? Mai 2018.
Réf PP-UNP-FRA-3095 - CV-FR-2400066-NP-Mars 2024